Les conflits d’intérêts présentés par la théorie d’agence

Avant de présenter les différents types des conflits d’intérêts présentés par la théorie d’agence et ses sources, il fallait présenter en bref les conditions d’application de cette théorie et ses hypothèses sous-jacents.

Dans ce contexte, Charreaux & Cies 70 (1987) soulignent que pour qu’il y ait des problèmes d’agence, il faut qu’il y ait à la fois :

  • Une divergence d’intérêts entre le principal et l’agent : expliquée par deux phénomènes : d’une part les dirigeants ont une partie majeure de leurs patrimoines (leurs capitaux humains) investis dans leurs sociétés, et sont par conséquent beaucoup plus sensibles à la variabilité des résultats de la société que les actionnaires qui peuvent facilement diversifier leurs portefeuilles.

D’autres parts, l’horizon des dirigeants est limité à leur présence dans l’entreprise. Ils vont avoir donc intérêt à investir dans des projets moins risqués et plus rentables à court terme. Ajoutant ici qu’Adam Smith (1776) a précisé que les dirigeants, étant régisseurs de l’argent d’autrui plutôt que de leur propre argent, n’apportent pas, le plus souvent, la vigilance exacte et soucieuse que celle, souvent apportée par les associés.

  • Une incertitude, une imparfaite observabilité, des coûts d’établissement et d’exécution de contrat : le problème de l’imparfaite observabilité de la part des apporteurs des capitaux des actions posées et des décisions prises par les dirigeants ainsi que l’importante asymétrie sur le plan de l’information détenue par l’agent et le principal sont les conséquences de l’incertitude qui caractérise le monde des affaires.

Ajoutant aussi que l’analyse de la théorie d’agence est basée sur deux hypothèses comportementales fondamentales :

  • La première consiste à supposer que les dirigeants cherchent à maximiser leurs richesses personnelles au détriment des actionnaires, ainsi, Jensen et Meckling (1976) ont montré que tout dirigeant ne détenant pas la totalité du capital de son entreprise a intérêt à utiliser une partie de la richesse de la firme pour des satisfactions personnelles puisque, le coût de celle-ci est réparti entre les actionnaires, il n’en supporte qu’une fraction proportionnelle à sa part dans le capital.
  • La deuxième hypothèse stipule que les individus sont rationnels et capables de prévoir l’impact de ces problèmes d’agence sur la formation de leur richesse.

Les conflits d’intérêts entre les dirigeants et les actionnaires

Les coûts d’agence causés par ces conflits

Selon Jensen et Meckling, la divergence d’intérêts qui peut apparaître entre dirigeants salariés (agent) et actionnaires (principal : propriétaire de l’entreprise) génère un certain nombre de coûts appelés « coûts d’agence » :

  • Les « Monotoring costs » : ce sont les coûts de surveillance encourus par le principal pour contrôler les activités de l’agent et essayer de limiter son comportement opportuniste.
  • Les « Bonding costs » : ce sont les coûts de l’obligation que l’agent peut encourir pour mettre le principal en confiance, ainsi ces coûts représentent l’ensemble des frais engagés par les dirigeants pour émettre des signaux crédibles en ce qui concerne leurs performances de gestion concernant des caractéristiques véritables des entreprises qu’ils gèrent.
  • Le troisième type de coût est la « Residual loss », (les coûts résiduels), appelés encore pertes résiduelles, qui résultent de l’impossibilité d’exercer un contrôle total sur les actions des dirigeants et se traduisent par une perte de valeur de la société.

Dans le premier et le deuxième type de dépenses, on trouve les dépenses d’audit ; D’une part, l’audit est utilisé par le dirigeant pour signaler sa performance de gestion et son respect des clauses contractuelles établis dans le cadre d’un contrat d’intéressement basé sur les chiffres comptables, d’autre part, l’audit est utilisé par les actionnaires pour s’assurer que le dirigeant agit dans l’intérêt de l’entreprise.

Ajoutant ainsi que Ettredge, Simon, Smith et Stone fait la distinction entre les coûts d’agence internes et ceux externes ;

  • Les coûts d’agences internes découlent de la différence entre les objectifs des dirigeants avec ceux des employés de la firme.
  • Les coûts d’agence externes : peuvent naître de la différence entre les objectifs des dirigeants de la firme et ceux des fournisseurs de capitaux.

Olivier HERRBACH, dans son thèse de doctorat a critiqué cette hypothèse en indiquant qu’elle ignore les liens normatifs et effectifs qui se développent entre les individus et créent un réseau complexe déloyautés, d’engagements et d’interdépendances qui dépassent le lieu économique.

Les origines des conflits entre les actionnaires et les dirigeants

En cherchant dans les causes des conflits d’intérêts entre dirigeants et actionnaires, Jensen et Smith (1985) ainsi que Naranayan (1985a, 1985b) présentent plusieurs sources :

  • Les dirigeants ont leurs capitaux humains investis dans la société, donc ils sont beaucoup plus sensibles à la variabilité des résultats de la société que ceux des actionnaires qui peuvent se diversifier plus facilement.
  • Le problème d’asymétrie d’information entre dirigeants et actionnaires.
  • Les efforts déployés par les dirigeants en faveur de l’entreprise, même s’ils sont bénéfiques aux actionnaires comportent pour eux une désutilité.
  • Le fait que l’horizon des dirigeants est limité à leur présence dans l’entreprise, va les amener à investir dans des projets moins risqués et plus rentables à court terme.

Ajoutant ici que Charreaux indique que si les actionnaires sont distincts des dirigeants, il s’ensuit une relation d’agence et les problèmes traditionnels qui lui sont liés, qui naissent des conflits d’intérêts et de l’asymétrie d’information.

Les dirigeants sont nécessairement en conflit avec les actionnaires pour les raisons suivantes : l’essentiel de leur patrimoine (le capital humain) est investi dans la firme, leur horizon économique est limité à la durée de leur fonction, ils peuvent accroître leur utilité par différents avantages en nature au détriment des propriétaires.

Ainsi, Jensen et Meckling (1976) ont montré que le dirigeant actionnaire minoritaire a intérêt à utiliser une partie de la richesse de la firme pour une satisfaction personnelle puisque le coût de celle-ci est partagé entre tous les actionnaires, il n’en supporte qu’une partie proportionnelle à sa part.

Les conflits d’intérêts entre les actionnaires et les créanciers

Dans le cadre de la relation actionnaires et créanciers, on va considérer que les actionnaires agissent à travers les dirigeants.

En fait, cet argument est contesté par Demstz (1983) pour lequel il n y’a aucune raison que les dirigeants bénéficient de plus d’avantage non pécuniaires dans les firmes managériales que les firmes dont ils sont les propriétaires principaux.

Selon Raffournier (1990), il est facile dans cette condition de monter que les créanciers et les actionnaires sont également dans une relation contractuelle puisque, les premiers confient aux secondes des ressources en échange d’une promesse de rémunération et de remboursement à l’échéance.

En cas de recours à l’endettement, les actionnaires peuvent être considérés comme mondataires des créanciers. Dans ce cas, des conflits d’intérêts peuvent surgir si les dirigeants et les actionnaires, dont les intérêts sont supposés confondus, détournent une partie de la richesse de la firme au détriment de créanciers.

Ainsi, plusieurs études ont été faites pour analyser les différents mécanismes de détournements de richesse opérés par les actionnaires au détriment de créanciers, on peut citer par exemple celle de Black (1976), Fama & Miller (1972), Smithn& Warner (1979).

D’après leurs analyses, dans toute société où il aura recours à l’endettement, les actionnaires ont intérêt à entreprendre des activités de financement, production et investissement à travers lesquelles ils peuvent réaliser des profits en portant atteinte aux intérêts de leurs obligataires et créanciers.

La théorie d’agence identifie trois sources de conflit entre les actionnaires et les créanciers :

La politique de dividendes

La première source provient de la politique de dividendes, ainsi, si les créanciers ont évalué leurs créances en supposant que le niveau de distribution actuel allait être maintenu, tout accroissement non anticipé des dividendes, financé par l’émission des nouvelles dettes ou par la réduction du programme d’investissement, entraînera une diminution de la valeur de la dette.

La politique d’endettement

La deuxième source de conflit trouve son origine dans le fait qu’un niveau d’endettement excessif entraîne un risque de faillite qui incite les actionnaires à entreprendre les projets d’investissements le plus risqué.

Aussi une anticipation future de l’endettement peut privilégier les conditions des nouvelles dettes que celle des anciennes.

La politique d’investissement

La troisième source de conflit identifiée par la théorie d’agence trouve son origine dans le caractère sous- optimal que peut avoir la politique d’investissement. Ainsi, lorsque les actionnaires disposent d’un passif comportant une importante de dettes risquées, ils ont intérêt à rejeter les projets ayant une valeur actuelle positive si le gain lié à l’acceptation de ces projets revient aux obligataires ou créanciers

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