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Modèle linéaire et modèle complexe du processus d’innovation

L’intérêt croissant envers le processus d’innovation et sa relation avec la croissance économique a résulté en un travail exhaustif de littérature spécialisée sur les diverses facettes du processus d’innovation.

L’innovation existe sous plusieurs formes depuis des siècles mais, elle est davantage présentée sous la forme d’une démarche structurée à partir des années 1950.

Afin de présenter l’évolution de l’innovation, nous privilégions l’approche des cinq générations de l’innovation (tableau 1) du sociologue Britanique Roy Rothwell comme représentant le plus fidèlement possible l’évolution des modèles d’innovation depuis les années 1950 car son modèle englobe plusieurs modèles et approches en matière de gestion de l’innovation.

Modèle linéaire et modèle complexe du processus d'innovation
Tableau : Historique des modèles de processus d’innovation, adapté de Seidler-de Alwis et Hartmann (2008)

Ajoutant au modèle des cinq générations, un 6ème modèle dite de l’innovation ouverte, apparu dans le début des années 2000. Ce modèle part de postulat que les idées internes et externes ainsi que des canaux internes et externes peuvent être combinés pour faire avancer le développement des nouvelles technologies.

A ce propos on va décortiquer notre article en deux grands points, à savoir le modèle linéaire sera traité dans le premier point, et le modèle complexe dans un deuxième point.

Modèle linéaire du processus d’innovation

Dès le début des années 1950, la R&D fut introduite dans un modèle du processus d’innovation : le modèle linéaire et hiérarchique.

Ce modèle est dit linéaire dans la mesure où le processus d’innovation est représenté comme une succession d’étapes, qui constituent autant de points de passage obligés. À l’origine du processus d’innovation se situe l’activité de recherche, à laquelle fait suite le développement, la production puis la mise sur le marché d’un produit nouveau.

Ce modèle est dit hiérarchique car on suppose que les sorties d’une étape considérée constituent les entrées de l’étape suivante, ce qui revient à dire qu’il faut nécessairement attendre que l’étape considérée soit terminée pour que l’étape suivante puisse être activée.

Dans cette optique, les tâches sont effectuées de façon séquentielle et ne peuvent être menées en parallèle (contrainte d’antériorité). Un tel mode de fonctionnement s’accommode d’une organisation cloisonnée et d’une spécialisation des individus ou des activités.

Décrit à l’aide d’un modèle linéaire et hiérarchique, le processus d’innovation apparait donc comme un processus séquentiel, à l’enchainement parfaitement prévisible. Les séquences s’enchainent de manière linéaire interdisant tout retour d’information et ne reconnaissent aucun mécanisme d’apprentissage tout au long du processus. Plusieurs modèles dérivés inspirés par le concept linéaire sont apparus.

Le modèle de la première génération « Technology Push »

Dans ce modèle, ce sont les découvertes et les recherches scientifique qui poussent les entrepreneurs à trouver des applications et donc à innover. L’innovation consiste alors à donner un usage social à l’invention. En conséquence, les innovations créent le besoin du marché.

Le « modèle Push Technology » est considéré comme la première génération du modèle linéaire. Il a été inspiré par le travail économique de Joseph Schumpeter et a été développé au cours de la fin des années 1950 et le milieu des années 1960. Dans ce modèle la technologie est considérée comme le principal moteur de l’innovation.

Ce modèle est fondé sur l’idée que les étapes du processus d’innovation sont prévisibles et que l’on peut par avance prévoir les ressources nécessaires à mobiliser. Ceci a orienté fortement les politiques en matière de recherche et a poussé divers gouvernements à augmenter les dépenses en R&D.

Figure : le modèle modèle de la première génération « Technology Push »

Le modèle de la deuxième génération « Demand Pull »

Dans le modèle de l’innovation tirée par la demande, les innovations découlent d’une demande perçue, qui influence la direction et la vitesse de développement des technologies.

Selon cette vision, le plus grand challenge est l’investissement efficace dans le marketing et l’identification des besoins du client. Le marché devient le nouveau pilote pour orienter la recherche et le développement. Ce principe a été initié par Schmookler en 1966. Pour qui, ce n’est pas la science qui pousse l’innovation mais le marché, en d’autres termes la demande qui incite et explique l’innovation. Les demandes du marché sont prises en compte par un entrepreneur, un inventeur voire une entreprise qui cherchent des solutions innovantes pour y répondre.

Ce modèle cherche à connaitre les besoins des clients pour les satisfaire via l’innovation, à l’heure actuelle nous pensons que le consommateur est comblé par l’énorme offre existante, au lieu de chercher les besoins des clients, le marketing est censé imaginer de nouveaux besoins, crée de nouvelles offres, le consommateur qui dispose des moyens ne fera que céder à cette nouveauté suite à la forte persuasion marketing de nos jours.

Figure : Le modèle de la deuxième génération « Demand Pull »

Le modèle « Stage-Gate »

Le « modèle Stage-Gate » est un modèle linéaire dérivé, introduit par Robert G.Cooper dans le but de réduire les risques liés aux coûts de production. Principalement utilisé pour la gestion de projet, ce modèle divise le processus d’innovation de produit en cinq stades avec des portes définies agissant en tant que points de décision entre les étapes.

A la fin de chaque étape existe une porte d’étape, qui consiste en un examen de phase afin d’évaluer si la phase ou l’étape précédente a été complétée avec succès. Les conditions de déclenchement d’une phase opératoire sont d’une la fin de phase précédente et la décision de continuer, d’autre part. si le projet est examiné positivement, le travail passe à la phase suivante. Si non, le processus s’arrête dans cette phase jusqu’à son accomplissement avec succès.

Figure : Le modèle « Stage-Gate »

Le modèle « Stage-Gate » présente l’avantage d’assurer une meilleure qualité dans le processus d’innovation, les risques financiers sont donc supposés limités. De plus, les contrôles et le suivi de l’innovation sont relativement simplifiés.

Malgré, les avantage que présente le modèle linéaire, mais il est confronté à plusieurs critiques.

Critiques du modèle linéaire

La première critique a trait à l’importance et la place accordées à la R&D : plusieurs études ont cependant montré qu’il n’existait pas de relation causale simple entre le nombre de chercheurs, ou les montants investis en R&D, et le taux d’innovation, la croissance économique ou plus simplement, la compétitivité d’une entreprise (Dertouzos Lester, Solow, 1989 ; Bonnaure Barré,1995), conduisant un certain nombre d’observateur à souligner le décalage entre la conception théorique de l’innovation et la réalité des entreprises ( Morand, Manceau, 2009).

La confrontation de ce modèle à de nombreux cas d’innovations conduit à relativiser l’importance accordée à la science dans le fait innovatif. L’histoire des sciences et techniques montre effectivement qu’il existe des innovations qui ne possèdent pas d’origine scientifique.

On peut citer à titre d’illustration la construction de la machine à vapeur. C’est-elle qui a permis des avancées en thermodynamique et non pas l’inverse ce qui a conduit P.Verley à souligner que « paradoxalement, la science apprit sans doute plus de la technique, que la technique de la science. » (Verly, 1997).

La seconde critique adressée au modèle d’innovation linéaire tient précisément à sa linéarité et à la non prise en compte des rétroactions ‘’ feed-back’’ qui viennent ponctuer le déroulement de tout processus d’innovation (Héraud, 1995).

La vision du processus d’innovation linéaire initié par la R&D fut également contestée par la prise en compte des besoins dans la dynamique d’innovation (Gruber, Marquis, 1969), ce qui a progressivement conduit à opposer le modèle d’innovation « science push » au modèle d’innovation « demand/market pull » et à considérer le rôle des utilisateurs dans le processus d’innovation (Von Hippel,2005).

La troisième critique adressée au modèle d’innovation linéaire tient au fait qu’il restreint l’innovation à ce qu’on peut appeler l’innovation technologique. C’est cependant oublier que l’innovation est polymorphe « une innovation est la mise en œuvre—la commercialisation ou l’implantation—par une entreprise, et pour la première fois, d’un produit ou d’un procédé nouveau ou sensiblement amélioré, d’une nouvelle méthode de commercialisation ou d’une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques d’une entreprise, l’organisation du lieu de travail ou les relations avec l’extérieur .», et que toutes les innovations ne requièrent pas obligatoirement un recours à la recherche.

La dernière critique adressée par Kline Rosenberg réside dans le modèle linéaire présente chaque étape du processus d’innovation comme une boîte noire, « les économistes ont globalement analysé l’innovation technologique comme une boîte noire (…). De ce fait, ils ont accordé très peu d’attention à ce qui se passe réellement à l’intérieur de la boîte ».

Il subsiste donc une ambiguïté dans la mesure où on ne traite pas à proprement parler du processus de production de l’innovation. Autrement dit de sa genèse. Entendons par là que si le progrès technique est endogenèse au regard d’une finalité économique, on ne sait pas comment on passe effectivement de l’invention à l’innovation.

Avec l’évolution de la société et mondialisation de l’économie, le concept linéaire est remet en cause, au détriment de nouveaux modèles d’innovations, plus complexe et plus complets, s’adaptant mieux à la situation économique, ce quand va voire tout de suite .

Le modèle complexe du processus d’innovation

L’objet de cette section est de proposer une représentation des processus d’innovation fondée sur le « paradigme » de la complexité. Elle s’appuie sur les travaux des économistes et les sociologues de l’innovation.

Cette présentation portera sur 4 modèles de processus : le modèle de couplage ; le modèle de la chaine liée ou modèle Kline ; Le modèle intégré de l’innovation, les modèles en réseau ;

Le modèle de couplage 3ème génération

Un mix de ces 2 approches déboucha sur le modèle de 3ème génération où le « research push » et le « demand pull » pouvait fluctuer en fonction des phases du processus d’innovation et cohabitant naturellement.

Dans les années 1970, ce 3eme modèle se répandit avec une approche interactive entre les besoins client et la recherche.

Selon cette vision, le principal challenge est la communication inter-organisationnelle marketing -recherche.

Ce modèle se diffère des autres, il établit des boucles de rétroactions entre les étapes afin d’ajuster le produit au besoins du marché et de modifier l’aspect technologique, si nécessaire .

Le schéma suivant résume ce modèle.

Figure : le modèle de couplage

Le modèle de la chaine liée ou modèle Kline

Dans un article, Kline et Rosenberg ont effectué une profonde critique du modèle linéaire et ont proposé un modèle interactif – modèle d’innovation lié en chaîne – (le modèle de « liaisons en chaîne ») solidement fondé sur la connaissance de l’histoire et des innovations concrètes (Kline et Rosenberg, 1986).

Les critiques principales de Kline et Rosenberg au modèle linéaire sont les suivantes :

  • Il ne considère pas les effets de réalimentation qui se vérifient pendant le processus de développement, ce qui perturbent le caractère expérimental et interactif de l’innovation ;
  • Il admet que le processus d’innovation a une origine fondamentale dans la science, alors que, pour les auteurs, il se situe dans les objectifs successifs de nouveaux produits et processus ;
  • Il n’intègre pas le fait que la science, pour évoluer, dépend de la technologie. Par exemple, l’astronomie moderne est due aux découvertes de Galilée et celles-ci n’auraient pu être vérifiées sans l’aide du télescope. Donc, la technologie fournit des instruments et des processus fondamentaux au service de la science ;
  • Il met en rapport le flux d’innovations avec celui de la connaissance scientifique.
    Comme on le sait, la plupart des innovations est faite à partir des connaissances scientifiques disponibles (« stock » de la science) ;

Le modèle linéaire n’évalue pas de façon adéquate les innovations de processus, qui ont un rôle significatif, au moyen de l’apprentissage pendant la production.

Ce processus est dit aussi « processus de conception » joue un rôle central dans le processus d’innovation il permet de créer un lien entre les laboratoires de recherche, les industriels et la production.

Ce processus de conception se divise lui-même en diverses étapes :

  • l’invention et la conception analytique
  • la conception détaillée et les essais
  • la conception finale
  • la production
  • la mise sur le marché de l’innovation

En plaçant, le processus de conception au centre du processus d’innovation, les deux auteurs refusent la toute-puissance de la science sur le fait innovatif.

À ce premier axe s’en superpose un autre qui est constitué par l’ensemble des rétroactions. Ces dernières peuvent intervenir à différents niveaux :

  • entre deux étapes successives de la chaîne
  • faire remonter plusieurs étapes en arrière
  • rétroagir sur l’ensemble du processus d’innovation en cas d’un nouveau besoin par exemple

La Science n’est plus l’élément central mais elle intervient selon deux modalités :

  • il est possible de puiser des connaissances dans le stock existant afin d’alimenter le processus d’innovation ou si ce stock n’est pas suffisant de solliciter de nouvelles connaissances pour satisfaire le processus d’innovation engagé
  • la nature des connaissances puisées varie en fonction de chaque étape du processus d’innovation. Par exemple, au moment de l’invention, ce sont plutôt les connaissances de recherche fondamentale qui sont sollicitées alors qu’au moment du développement, on sollicite davantage une recherche qui concerne la façon dont les différents composants peuvent interagir.

Il peut exister des innovations radicales directement issues du développement de sciences nouvelles mais elles sont très rares ( semi-conducteurs par exemple

Certaines rétroactions peuvent émaner de l’innovation pour agir sur la recherche scientifique et sa dynamique : les relations ne sont pas unilatérales.

Le modèle intégré de l’innovation : quatrième génération

Pour améliorer le manque d’intégration fonctionnelle dans les modèles linéaires, le modèle intégré de l’innovation a été développé au cours des années 80. Il met l’accent sur l’importance d’incorporer différents départements de l’organisation pendant le développement d’un nouveau produit ou service (développement parallèle).

Donc la pensée est dirigée vers un processus intégré où les différentes étapes du processus de développement se produisent en même temps. Cette approche considère le processus d’innovation comme un ensemble d’activités parallèles intégrés dans les fonctions organisationnelles (Figure ci-dessous).

Cela inclut de nouvelles interactions fortes avec les autres acteurs de la production, en amont avec les fournisseurs clés et en aval avec les principaux clients. La boucle de contre-réaction et l’aspect non- linéaire séquentiel permettent l’évolution d’un tel processus en maintenant les caractéristiques de l’intégration e de l’état d’avancement parallèle de toutes les étapes.

Figure : Réunion conjoint du groupe (ingénieurs et managers)

Les modèles en réseau de la cinquième génération

L’approche de la cinquième génération des processus d’innovation a été provoquée par des contraintes de temps. Etre le leader des innovations sur le marché est insuffisant, offrir un produit innovant dans un court laps de temps représente un véritable avantage concurrentiel .

Les entreprises ont adopté une stratégie basée sur le temps à travers l’utilisation d’outils électroniques sophistiqués fonctionnant en temps réel afin d’automatiser le processus d’innovation et d’accélérer la vitesse et l’efficacité du développement de nouveaux produits au sein du réseau d’innovation comprenant les fonctions internes, les fournisseurs, les clients, les partenaires et les collaborateurs extérieurs.

C’est (l’électronisation de l’innovation) Galanaki propose un autre modèle pour expliquer l’approche en réseau de la cinquième génération des processus &innovation, c’est une description systémique appelée « the creative factorysystems ».

L’entreprise est le centre de ce modèle, elle est le générateur et le promoteur de l’innovation sur un marché, un secteur industriel ou une nation.

Figure : the creative factorysysteme

Le processus d’innovation globale du modèle est un construit de trois principaux processus d’innovation :

  • Le processus de création des connaissances qui émane de la recherche publique, industrielle ;
  • Le processus de développement du nouveau produit. Qui transforme les connaissances en un produit innovant ;
  • La réussite du produit sur le marché, qui dépend des qualités fonctionnelles du produit et des compétences organisationnelles de l’entreprise à le produire à un prix raisonnable avec une bonne qualité et le placer correctement sur le marché.

Ce processus est influencé aussi bien par des facteurs internes à l’entreprise (par exemple la stratégie d’entreprise, la structure organisationnelle…), que par des facteurs externes dans’ l’environnement national (par exemple, les règlements, l’infrastructure nationale…).

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