portées et limites de la revue analytique

La collecte des éléments probants constitue une étape importante dans la démarche de révision de l’auditeur. Parmi les moyens et les techniques dont ce dernier dispose pour réunir les éléments probants, figure la revue analytique.

Notre travail sur la revue analytique sera diviser en cinq articles :

  • Le premier article précise la définition et place de la revue analytique ici
  • Le deuxième article concerne les portées et limites de la revue analytique. c’est l’objet de notre présent article
  • Le troisième article présente la mise en oeuvre de la revue analytique ici
  • Le quatrième article résume les techniques de revue analytique ici
  • Le dernier article explique la revue analytique par cycle ici

I. Portées de la revue analytique

La revue analytique est un moyen de contrôle qui permet à l’auditeur de :

  • identifier les éléments significatifs de l’entreprise ;
  • vérifier la régularité et la sincérité de certains éléments constitutifs des états de synthèse ;
  • vérifier la cohérence de l’ensemble des états de synthèse.

Toutefois la valeur probante de la revue analytique est limitée par certains facteurs qui affectent sa capacité à détecter les variations inhabituelles.

  • Identifier les éléments significatifs

Lors de la phase de prise de connaissance de l’entreprise (ou du groupe) l’auditeur cherche à déterminer :

– La première année de son mandat, les types de transactions qui ont ou peuvent avoir un impact significatif sur les comptes (catégorie de ventes ou d’achats, filiales…) en raison de leur poids relatif, et/ou de leur nature. C’est en fonction de cette analyse préalable que l’auditeur pourra planifier sa mission et déterminer la nature et l’étendue de ses travaux pour chacun des éléments ainsi identifié.

– Les années suivantes, les événements propres à chaque exercice qui nécessitent une mise à jour de sa planification et une modification de son programme de travail (création d’une nouvelle ligne de produits, ouverture d’une nouvelle entité géographique ou juridique, mise en place d’un nouveau système…).

La revue analytique des derniers comptes annuels disponibles, des budgets, ou des comptes intermédiaires établis par l’entreprise permet à l’auditeur de comprendre les inter-relations qui existent entre les différents éléments constitutifs des comptes annuels et de déceler les variations qui peuvent être révélatrices de modifications de structure, d’événements ponctuels spécifiques à chaque exercice…

La revue analytique préalable permet notamment à l’auditeur de définir les ratios qui lui semblent les plus révélateurs de l’évolution de l’entreprise et de s’assurer que les éléments nécessaires à l ‘explication de leur variation seront disponibles.

L’auditeur peut à ce stade utilement s’appuyer sur les statistiques du secteur économique auquel appartient l’entreprise : cela lui permet de mieux comprendre les éléments qui servent de mesure dans ce secteur et de situer l’entreprise considérée par rapport à ses concurrents.

Cette identification des éléments significatifs doit avoir lieu :

– chaque année avant de procéder à l’appréciation du contrôle interne (mise à jour de la connaissance générale de l’entreprise) ;

– avant le démarrage du contrôle des comptes pour pouvoir identifier les éléments inhabituels qui se seraient produits depuis l’appréciation du contrôle interne et qui pourrait être révélateurs soit d’une défaillance inattendue du contrôle interne, soit d’événements non encore identifiés, soit de variations incohérentes des chiffres avec les autres informations obtenues sur l’activité de l’entreprise au cours de l’exercice. Le programme de travail de l’auditeur est modifié en conséquence.

  • Vérifier la régularité et la sincérité

Pour certains éléments constitutifs des comptes annuels, sous réserve des limites de fiabilité du procédé telles qu’exposées ci-après, l’auditeur peut utiliser la revue analytique comme procédé de vérification : il en sera ainsi, par exemple, pour certaines catégories de charges ou de produits qui représentent une part relativement faible du compte des produits et charges et qui sont caractérisées par une relative stabilité d’un exercice à l’autre ; ce procédé peut également être employé pour certains comptes d’actif ou de passif au bilan.

La revue analytique ne peut être employée comme seul procédé de vérification que s’il ne révèle pas de variation (ou d’absence de variation) anormale ; au cas contraire, toute variation incohérente avec les autres données doit faire l’objet de recherches plus approfondies.

  • Vérifier la cohérence des comptes annuels

Après avoir procédé aux contrôles détaillés des éléments constitutifs des comptes annuels, l’auditeur doit s’assurer de la cohérence globale des états de synthèse entre eux et avec le dossier de contrôle. La revue analytique sera particulièrement utile si l’auditeur a demandé la prise en compte de certains ajustements ; en effet, il est possible que ces ajustements fassent apparaître des variations incohérentes qui étaient auparavant masquées par les anomalies. Ces variations devront alors faire l’objet de recherches complémentaires.

II. Limites de la revue analytique

Outre la limite due à la capacité de la revue analytique à déceler ou non les variations inhabituelles, les limites de la confiance que peut accorder l’auditeur aux résultats de l’application des procédures de revue analytique dépendent également des facteurs suivants :

  • les objectifs de la procédure appliquée ;
  • l’importance relative et la nature des éléments en cause par rapport à l’ensemble des comptes annuels ;
  • les autres procédures de révision mises en œuvre par le commissaire aux comptes et ayant les mêmes objectifs ;
  • la précision avec laquelle on peut prévoir les résultats de l’application des procédures de revue analytique.

Il est clair toutefois que ces facteurs ne sont pas indépendants les uns des autres et que la limite de confiance à accorder à une revue analytique est généralement la résultante de plusieurs d’entre eux.

  • Capacité à déceler les variations inhabituelles

La revue analytique étant fondée sur la cohérence des relations qui existent entre les comptes dans une période donnée ou sur plusieurs périodes, il n’est possible d’identifier des variations incohérentes qui si les données analysées remplissent certains critères.

Le premier critère concerne la comparabilité des données : en effet si les données ne sont pas constituées sur des bases comparables, il est très difficile de dissocier la part de variation du poste ou du ratio qui est due aux changements de celle qui est due à d’autres causes. On peut citer à titre d’exemple :

– si les règles d’imputation des opérations ont été modifiées d’un exercice à l’autre, les variations des postes concernés ne pourront pas être cohérentes avec l’exercice précédent ;

– si la gamme de produits d’une entreprise a été modifiée, il ne sera possible d’expliquer les variations de marge brute que si l’on peut isoler les incidences des nouveaux produits ;

– si l’activité d’une entreprise est essentiellement saisonnière, les comparaisons de chiffre d’affaires d’un mois sur l’autre ne permettront pas de déceler les décalages de facturation dus à des erreurs de séparation des exercices…

Le deuxième critère qui influe sur la capacité de la revue analytique à détecter des variations anormales concerne l’existence effective de relations mesurables entre les données analysées. Ces relations ne sont pas toujours possibles à cerner avec précision, notamment dans les entreprises qui ne disposent ni d’une comptabilité analytique, ni d’un système de contrôle de gestion suffisamment précis.

Par ailleurs, si les données analysées sont susceptibles d’être influencées par un trop grand nombre de facteurs, il peut se produire des compensations qui cachent des variations significatives : l’évolution globale des coûts de production peut, par exemple, sembler cohérente alors qu’il y a des variations incohérentes dans certaines composantes comme la main d’œuvre, les consommations…

  • Limites dues aux objectifs de la procédure

La confiance placée dans la revue analytique dépend de ce que l’auditeur recherche : la procédure est plus probante pour identifier des éléments significatifs ou confirmer les résultats d’autres contrôles que pour démontrer à elle seule la fiabilité d’un compte…

  • Limites dues à l’importance relative et à la nature des éléments en cause par rapport à l’ensemble des comptes annuels

Plus le poste (ou groupe de comptes) faisant l’objet de la revue analytique est important par rapport à l’ensemble du bilan ou du compte des produits et charges, moins il sera possible de se fonder sur les seuls résultats de cet examen pour conclure sur ce poste.

c’est ainsi que les stocks, qui représentent une part importante du bilan et qui ont une incidence significative sur le résultat de l’exercice, étant soumis à de nombreux mouvements qui se compensent, ne peuvent être vérifiés par une simple revue analytique (ce qui ne signifie pas que cet examen est inutile pour les stocks, c’est au contraire, un élément essentiel pour orienter les travaux et vérifier la cohérence) ; par contre, pour des postes moins significatifs, sans variation inattendue, une simple revue analytique peut être suffisante pour en vérifier le caractère raisonnable.

  • Autres procédures de révision mises en œuvre par le commissaire aux comptes et ayant les mêmes objectifs

La force probante de la revue analytique est renforcée si ses résultats confirment les informations obtenues lors de la mise en œuvre d’autres techniques de révision ayant les mêmes objectifs. Inversement, la force probante des autres techniques est renforcée si leurs résultats sont confirmés par la revue analytique. Par exemple, la revue des règlements reçus des clients après la clôture de l’exercice confirme l’absence de créances douteuses identifiée par la revue analytique de la balance par ancienneté de créances ; de même, l’absence de variation incohérente dans les comptes de charges accroît la fiabilité des sondages sur la séparation des exercices.

  • Précision avec laquelle on peut prévoir les résultats

La revue analytique ne peut s’appliquer utilement que s’il est possible de déterminer à l’avance les relations existant entre les éléments qui seront comparés : on peut, par exemple, tirer un enseignement de l’évolution, d’un exercice à l’autre, de la marge brute par catégorie de produit, alors que la comparaison d’un poste qui enregistre des charges exceptionnelles n’apportera aucun élément ; des statistiques précises sur le coût des garanties accordées permettent de vérifier la valeur des provisions constituées…

La précision avec laquelle on peut ainsi prévoir les résultats de la revue analytique nécessite une très bonne connaissance de l’entreprise et des éléments de son activité qui peuvent modifier les relations existantes.

  • Appréciation du contrôle interne

Si l’auditeur conclut que le contrôle interne de l’entreprise est très bon, c’est-à-dire qu’il est conçu et appliqué de façon à empêcher, ou détecter et corriger toute anomalie significative dans les données traitées par les systèmes d’information, il pourra accorder une confiance importante aux résultats de la revue analytique.

Dans une entreprise qui dispose, par exemple, d’un bon système de contrôle de gestion (compte de résultat analytique par service, comparée régulièrement avec un budget réaliste, et faisant l’objet d’analyse précise par l’entreprise…) l’auditeur sait que toute variation significative non expliquée est révélatrice d’un problème non dominé par l’entreprise et pour lequel il doit faire des recherches approfondies. Par contre, dans une entreprise où le contrôle interne est faible, il est impossible de savoir à l’avance si les variations sont dues à des anomalies ou à des modifications effectives de l’activité.

La fiabilité du contrôle interne est particulièrement importante lorsque l’auditeur veut utiliser la revue analytique pour vérifier des informations intérimaires : en effet, si le contrôle interne est bon, l’auditeur sait qu’il y a peu de risques que les comptes contiennent des erreurs significatives qui ne seraient pas révélées par une revue analytique.

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