L’élaboration d’un programme de service à la clientèle

Le service à la clientèle exige de l’entreprise qu’elle soit constante dans sa prestation de service, car chaque fois qu’elle entre en contact avec un client, il y a un risque qu’il ne soit pas satisfait. Pour cette raison, les services automatisés (système téléphonique, site Internet, application, guichet) doivent être efficaces et tous les employés doivent être conscients de l’importance du service à la clientèle.

Les cadres supérieurs doivent définir des stratégies et s’assurer que les ressources humaines et financières sont suffisantes. Les cadres intermédiaires et les employés de première ligne, pour leur part, doivent s’assurer que la prestation de service est cohérente avec le programme de service à la clientèle mis sur pied par les cadres supérieurs.

Nous l’avons vu lors de la présentation du marketing mix, l’importance accordée au service à la clientèle croît d’année en année à un point tel qu’il est maintenant considéré par plusieurs comme la cinquième variable du marketing mix.

Cela sous-entend que les décisions concernant le service à la clientèle doivent être cohérentes avec celles concernant le prix, le produit, la communication et la distribution.

Par exemple, une entreprise qui offre des produits haut de gamme devra offrir un service à la clientèle exemplaire afin de satisfaire sa clientèle.

Dans les prochains points, nous aborderons les quatre phases de l’élaboration d’un programme de service à la clientèle, soit l’analyse, la décision, l’implantation et le contrôle.

La phase d’analyse de l’élaboration d’un programme de service à la clientèle

Lors de la phase d’analyse, les dirigeants s’emploieront à obtenir un portrait de la situation actuelle et à se poser la question : « Que fait-on ? » Pour pouvoir y répondre, ils questionneront les clients afin de connaître leur satisfaction actuelle sur le service reçu et sur leurs attentes.

Il est également souhaitable qu’ils demandent l’avis des employés de première ligne, car ce sont eux qui interagissent avec les clients sur une base quotidienne. Ils s’assureront enfin que l’analyse couvre toutes les prestations de service, avant, pendant et après l’achat.

La phase de décision

Au cours de la deuxième phase, l’entreprise devra déterminer ses orientations straté- giques en se posant la question : « Que voulons-nous faire ? » Pour pouvoir y répondre, les cadres supérieurs cerneront les services qu’ils désirent offrir à leurs clients et analyseront ceux qui influencent directement leur satisfaction en ne négligeant pas la rentabilité de l’entreprise. La gratuité des services étant de moins en moins courante, les entreprises optent maintenant massivement pour le concept d’utilisateur-payeur.

L’entreprise Énergie Cardio en est un bon exemple avec son concept Éconofitness. Avec ces nouveaux centres sportifs, elle vise une clientèle pour qui le prix est le principal critère de choix.

Par conséquent, l’entreprise inclut très peu de services dans son offre afin de pouvoir conserver un bas prix. Elle pousse même le concept jusqu’à tarifer l’utilisation de la douche (0,50 $ par minute).

En classant les services en fonction de deux axes, la valeur du service perçue par le client et le coût du service pour l’entreprise, on obtient quatre types de services.

Les services incontournables. Les entreprises ont tout à gagner en offrant des services dits « incontournables », car ils influencent grandement la satisfaction des consommateurs et ne sont pas très coûteux.

Par exemple, une entreprise de coiffure offrira du café à ses clients : ce petit geste à bas coût aura un impact direct sur leur satisfaction. Une connexion wifi dans les cafés et les restaurants entre dans cette même catégorie.

Les services décevants. À l’inverse, les services décevants doivent être immé- diatement abandonnés, car ils sont coûteux pour l’entreprise et n’influencent pas la satisfaction des consommateurs.

Par exemple, un hôtel bas de gamme pourrait cesser d’offrir son service de voiturier puisque celui-ci n’augmente pas la satisfaction de la clientèle qui recherche un bas prix. De plus, le coût de ce service est élevé puisque l’hôtel doit engager deux employés supplémentaires.

Les services neutres. Les services neutres sont peu coûteux, mais ils ont un faible impact sur la satisfaction du client. L’entreprise pourrait décider de les retirer si elle a l’impression qu’ils empêchent les employés de se concentrer sur les éléments ayant un réel impact sur la satisfaction.

À l’inverse, si les clients sont habitués à ces services, elle pourra décider de continuer de les offrir puisqu’ils ne sont pas coûteux. Par exemple, une épicerie pourrait décider de poursuivre l’offre de sacs de plastique pour les clients, étant donné qu’ils ne sont pas très coûteux, mais cette action pourrait avoir un faible impact puisque la très forte majorité de la clientèle utilise les sacs réutilisables et est conscientisée à l’environnement.

Les services de soutien. Les services de soutien sont très coûteux, mais ils ont un impact important sur la satisfaction de la clientèle. Un bon exemple de ce type de service est le soutien téléphonique offert par Vidéotron : l’entreprise investit beaucoup d’argent afin d’embaucher plus de personnel pour répondre rapidement aux usagers ayant des problèmes ou des questions, mais les clients apprécient réellement de ne pas être mis en attente de longues minutes.

Une entreprise peut recourir à la classification des services périphériques pour déterminer les services qui seront inclus dans son offre (voir la figure 1).

quatre phases de l’élaboration d’un programme de service à la clientèle

La phase d’implantation

Au moment de la phase d’implantation, l’entreprise doit réviser ses politiques et ses normes et mettre en pratique ses nouvelles façons de faire. Ce faisant, elle répondra à la question « Comment fonctionnerons-nous désormais ? »

Une politique peut être comparée à une loi explicite, clairement indiquée lors de l’achat, qui encadre la transaction et évite toute situation tendue provenant d’un malentendu. La politique la plus courante concerne les échanges et les remboursements.

Par exemple, chez Ikea, si vous changez d’idée ou n’êtes pas entièrement satisfait de votre achat, il suffit de rapporter l’article inutilisé dans les 45 jours suivant son achat afin de l’échanger ou d’être remboursé.

Le reçu de caisse et l’emballage d’origine sont requis pour tout échange ou remboursement. Il est généralement de la responsabilité des employés de première ligne de faire respecter les politiques. Il est toutefois fréquent que les clients soient insatisfaits des politiques et demandent de s’adresser à un superviseur.

Lorsque ce dernier outrepasse la politique afin de désamorcer le conflit, l’employé de première ligne perd la face aux yeux du client et sera tenté de ne plus appliquer les politiques.

Pour éviter de telles situations et pour faire diminuer le taux d’insatisfaction des clients, les entreprises peuvent octroyer une plus grande autonomie et déléguer plus de responsabilités aux employés de première ligne.

En outre, cette marge de manœuvre sera perçue comme une marque de confiance envers les employés, ce qui a des chances de se traduire par une augmentation de leur motivation et de la qualité de leur travail.

Des normes doivent également être élaborées pour encadrer le travail des employés de première ligne. Elles doivent être explicites, brèves et mesurables.

Par exemple, le conseil municipal de Montréal a établi de nouvelles normes pour encadrer l’industrie du taxi en 2015. Les chauffeurs doivent maintenant descendre de leur voiture pour ouvrir la portière aux clients qui ont réservé par téléphone ou par Internet.

Il leur est également interdit de parler sur leur téléphone cellulaire durant une course et doivent être vêtus d’un pantalon noir et d’un chandail blanc de type « polo » avec des manches.

Enfin, toutes les voitures doivent maintenant être munies d’une caméra. Finalement, les cadres intermédiaires doivent former les employés de première ligne pour s’assurer qu’ils sont en mesure de rencontrer les nouvelles politiques et normes de l’entreprise.

La phase de contrôle

La phase de contrôle permet de vérifier si les résultats sont conformes aux objectifs qui avaient été fixés. Deux types de contrôle seront abordés : le contrôle opérationnel et le contrôle stratégique.

Le contrôle opérationnel

Le contrôle opérationnel permet à l’entreprise de répondre à la question : « Faisons-nous ce que nous voulons faire ? » Dès lors, l’entreprise devra s’assurer que ses employés respectent les politiques et les procédures établies, qu’ils comprennent bien que ce sont eux qui représentent l’entreprise, qu’ils ne peuvent en aucun cas relâcher leur vigilance et qu’ils doivent tempérer leur humeur en ne laissant pas paraître les aléas de leur vie privée.

Pour s’assurer de la constance des employés, l’entreprise peut recourir à des modes d’évaluation du personnel comme les clients mystères ou les sondages de satisfaction. Idéalement, elle se servira des résultats pour encadrer les employés en difficulté, mais aussi pour féliciter les employés performants avec des cadeaux et des marques de reconnaissance.

Le contrôle stratégique

Le contrôle stratégique permet de répondre à la question : « Ce que nous voulons faire permettra-t-il de répondre aux besoins de la clientèle tout en étant rentable ? » La première façon de savoir si les clients sont satisfaits du service à la clientèle d’une entreprise est d’analyser les plaintes qui lui sont adressées.

En outre, chacune de ces plaintes doit être prise en considération, car pour chaque personne déposant une plainte, on peut penser qu’il y en a probablement dix autres vivant la même insatisfaction, mais que celles-ci ne la communiqueront pas à l’entreprise.

Pour cette raison, il faut toujours, selon Barlow et Moller, se souvenir qu’une plainte constitue un cadeau, en ce sens qu’il permet à l’entreprise de s’améliorer.

Par ailleurs, l’employé qui reçoit une plainte doit garder en tête que l’insatisfaction du client est dirigée contre l’entreprise et non pas contre lui et qu’un client qui se plaint demande en réalité à l’entreprise de lui venir en aide. Lorsqu’une entreprise est satisfaite de son service à la clientèle, elle doit alors s’assurer que celui-ci est rentable.

Il est généralement reconnu que les coûts de fidélisation sont moins élevés que les coûts d’acquisition. En d’autres termes, il semble plus rentable pour une entreprise de fidéliser sa clientèle en investissant dans son programme de service à la clientèle qu’en s’ingéniant à trouver de nouveaux clients pour remplacer ceux qui ont quitté l’entreprise pour cause d’insatisfaction.

En effet, la chasse aux nouveaux clients demande généralement de mener une coûteuse campagne de communication et de solder ses produits pour les inciter à acheter, ce qui diminue la marge bénéficiaire.

L’entreprise ne pouvant baser sa stratégie marketing sur un concept théorique, elle doit calculer la rentabilité de sa gestion de la relation client, ce qui est souvent ardu.

Contrairement aux promotions, par lesquelles l’entreprise peut constater la variation des ventes et ainsi juger de leur rentabilité, le lien de cause à effet n’est pas aussi direct en gestion de la relation client.

Pourquoi tel ou tel client demeure-t-il fidèle à l’entreprise ? Grâce à l’argent investi pour créer une base de données ? Aux outils technologiques mis à sa disposition ? Aux nouveaux services offerts ?

L’entreprise peut estimer la rentabilité de son service à la clientèle en évaluant la valeur à vie du client, ce qui lui permettra d’être plus en mesure de déterminer quel investissement destiné à la gestion de la relation client sera le plus rentable. Pour se faire, l’entreprise devra utiliser la formule suivante :

Fidélité moyenne des clients (en années) × nombre d’achats par année × profit moyen par achat

Par exemple, un concessionnaire d’automobiles pourrait faire le calcul suivant :

Fidélité moyenne (20 ans) × nombre d’achats par année (un par huit ans, soit 0,125) × profit par achat (7 000 $) = 17 500 $

Il faut ensuite ajouter à ce résultat la publicité que le client fera grâce au boucheà-oreille dans son entourage.

Par exemple, il n’est pas rare qu’un jeune adulte choisisse la même marque d’automobile que ses parents.

Pour notre démonstration, émettons l’hypothèse qu’un client influence trois personnes grâce au boucheà-oreille.

La valeur à vie du client devient le profit lié à ses achats (17 500 $) plus le profit résultant de son influence (17 500 $ × 3), ce qui lui donne une valeur à vie de 70 000 $.

Le concessionnaire devrait garder ce chiffre en tête lorsqu’un bris mineur surviendra sur un véhicule ! Il pourrait, par exemple, accepter de remplacer gratuitement une pièce valant 100 $ dont la garantie vient tout juste d’expirer dans le but de satisfaire et de conserver son client.

Conclusion

Le tableau 1 résume l’élaboration d’un programme de service à la clientèle en présentant ses quatre phases et les employés qui en sont responsables.

quatre phases de l’élaboration d’un programme de service à la clientèle
Tableau 1 les quatre phases de l’élaboration d’un programme de service à la clientèle
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