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Gestion des ressources humaines d’un projet

On examinera dans cet article sur la gestion des ressources humaines d’un projet successivement le processus de constitution de l’équipe, son animation, son évaluation / rémunération et sa dissolution, avant de faire quelques remarques sur la formation de ces acteurs.

Recrutement des chefs de projets et constitution des équipes–projets

Le recrutement doit porter sur des individus dotés de quelques-unes des compétences listées ci-dessus et motivés, ce qui implique de détecter les raisons qui peuvent pousser quelqu’un de talent à travailler dans un projet.

Ces raisons sont multiples et non exclusives: attrait de la nouveauté, esprit d’aventure, envie d’appartenance à une petite communauté emblématique, envie de prise de risques, attrait d’une expérience professionnelle à large spectre, enrichissement personnel lié à la multiplicité des contacts de cultures différentes, visibilité accrue dans l’entreprise, prise plus directe avec les enjeux stratégiques de l’entreprise, recherche de responsabilités plus que d’autorité, attrait pécuniaire et d’évolution de carrière.

Le choix du directeur (ou le coordinateur) de projet conditionne fortement le succès du projet. C’est un personnage très exposé. S’il est responsable d’un échec du projet, c’est l’équipe qui en assume la réussite. «Son profil affectif est plutôt marginal: capacité d’identification au destin du projet, équilibre indépendance / dépendance vis-à-vis des autres, efficacité dans les situations ambiguës.

De son expérience personnelle dépend beaucoup son efficacité: il doit connaître l’entreprise, ses métiers, ses hommes, disposer si possible de modèles culturels multiples, souvent acquis en dehors de l’entreprise actuelle […], voire dans d’autres lieux de la société» (Leclair, 1997). Le chef de projet RH du projet Twingo (Midler, 1993) précise que «le profil du bon chef de projet est plus facile à décrire qu’à trouver: il doit être à la fois légitime dans son métier d’origine et iconoclaste.

Légitime pour ne pas se «faire rouler dans la farine» dans les débats techniques, parce qu’il faut bien connaître le milieu des experts, pour savoir ceux qui peuvent aider à résoudre un problème, et ceux, il y en a hélas toujours, qu’il faut surtout éviter pour ne pas perdre son temps.

Parce qu’enfin, il doit pouvoir être en situation d’engager, par ses choix, sa direction métier d’origine. Mais il doit être aussi iconoclaste, car il doit pouvoir, en cas de conflit entre la stratégie métier et les impératifs du projet, jouer contre le camp de ses pairs techniques».

L’AFITEP décrit le profil idéal-typique du directeur de projet comme à la fois planificateur, négociateur, technicien expert, psychologue, vendeur, financier, inséré dans des réseaux pour trouver les compromis indispensables à la convergence du projet etc.

D’autres critères peuvent s’ajouter à cette liste et chaque critère peut se décliner: la capacité à résister au stress, charisme, disponibilité, etc. Il faut également que le profil du directeur de projet se modifie au fur et à mesure du déroulement du projet: de stratège créatif, il devient gestionnaire réaliste puis pompier (ECOSIP, 1993). Les attributions du directeur de projet et son périmètre de responsabilité sont classiquement définis par une lettre de mission.

Selon le degré de maturité du management de projet dans l’entreprise, cette lettre de mission peut être définie par des procédures bien établies ou par le directeur de projet pressenti à l’issue d’une négociation avec la direction générale ou la direction des ressources humaines. Dans ces derniers cas, il se peut que la cohérence entre objectifs et moyens ne soit pas bien assurée, ce qui est une source de risque pour le projet.

Dans ces conditions, ce qui va compter le plus pour leur recrutement «échappe largement à la vigilance de la fonction Personnel» (Leclair, 1997).La détection et le recrutement des acteursprojet poussent parfois la fonction Personnel à la frontière de problèmes déontologiques.

Les grandes entreprises peuvent entretenir un vivier ou marché interne de cadres à haut potentiel, voire des filières de carrière spécifiques pour leurs acteurs-projets. Un parcours multi-métiers les met à l’épreuve. La question de la détection des acteurs-projets n’est pas pour autant réglée pour les entreprises de taille plus réduite.

La DRH doit intervenir dans le recrutement d’acteurs-projet avec une instrumentation assez peu adaptée à la détection des compétences listées ci-dessus, d’autant qu’il s’agit de parvenir à un dosage délicat entre la compétence collective et l’expertise individuelle. Choisir les meilleurs experts ne veut rien dire en soi.

Une telle sélection est centrée sur l’individu et non sur contexte dans lequel il va s’insérer. On sait bien qu’il ne suffit pas de réunir un groupe de stars pour gagner un championnat. Il convient même de ne pas sélectionner certaines vedettes pour mieux optimiser les finalités collectives. Le processus de recrutement remplit alors une fonction cohésive capitale.

Par exemple, la décision de recrutement des équipes projets peut appartenir à la fois au responsable du groupe, aux autres membres de l’équipe, à la DRH et aux anciens salariés qui peuvent dire quelle est la compatibilité entre les personnes convoitées et la culture de l’entreprise. En tout état de cause, la DRH intervient le plus souvent pour adapter les relations contractuelles des acteurs-projet, si le projet a une certaine durée.

Animation de l’équipe-projet

On ne peut comprendre les spécificités de l’animation de l’équipe-projet si l’on ne prend pas en considération le fait que les connaissances initiales dont on dispose sur un nouveau projet sont insuffisantes pour pouvoir appliquer les approches classiques d’organisation et de contrôle et que l’objectif implicite est de maîtriser le processus d’acquisition de connaissances.

On ne s’attachera pas ici à préciser les modalités de l’animation de l’équipe proprement dite sur laquelle il existe de nombreuses publications
mais à définir trois impératifs qui doivent être respectés pour une telle animation (Midler, 1993).

Il s’agit d’abord, malgré la diversité des profils des membres de l’équipe, des tempéraments et des compétences de chacun, de constituer un groupe cohérent porteur d’une même vision du projet, capable de résister aux puissantes forces centrifuges que subit un projet dans les
moments difficiles.

La construction d’une vision partagée implique souvent des procédures «concentriques» centrées sur le directeur de projet qui permettent de faire circuler très rapidement des informations dans l’équipe ou, d’un autre côté, d’élaborer collectivement une politique de réponse face à un problème important.

Cette construction d’une vision partagée, qui peut s’appuyer sur l’usage de méta-règles, repose fondamentalement sur des relations de confiance mutuelle des acteurs-projets, de transparence et de droit à l’erreur, les procédures de contrôle étant réduite au sein de l’équipe-projet. Les conflits ne sont pas pour autant exclus; ils portent principalement sur les alternatives décisionnelles à des problèmes que les procédures sont chargées de révéler au plus tôt.

Le deuxième impératif est l’articulation sur le milieu plus vaste des intervenants sur le projet. On a ici à faire à des procédures de type «rayonnantes», centrées sur un métier donné et qui mettent en relation le pôle «projet» (par le Directeur de projet parfois, mais surtout le chef de projet-métier) et le pôle métier (par la hiérarchie du métier, l’entreprise responsable du lot de travaux…).

Dans ce cadre, le chef de projet-métier a un double rôle: il doit être en mesure d’identifier le besoin d’une expertise pointue qu’il ne posséderait pas et être capable de la mobiliser; il joue aussi un rôle de veille et fait remonter dans son service-métier, les évolutions de besoins qu’il détecte par le biais du projet.

Le troisième impératif est de gérer la dynamique de l’équipe-projet elle-même. Une équipeprojet vit, en quelques mois ou années, ce que vit une entreprise généralement en plusieurs décennies: naissance, structuration, croissance, dispersion. Les équipes-projets consacrent régulièrement des séminaires déconnectés des contraintes du temps réel pour penser leur devenir face aux étapes à venir ; en fin de projet l’incertitude sur les reclassements peut perturber gravement le fonctionnement du projet.

Évaluation et la rémunération des acteurs-projets

L’une des difficultés à résoudre pour la fonction RH est de mettre en cohérence le système de rémunération et d’évaluation de l’entreprise avec celui des projets. Des travaux sur l’organisation qualifiante ont montré que la question des rémunérations est rarement évoquée comme élément essentiel par ceux qui s’intéressent au développement de nouvelles organisations du travail (Amadieu et Cadin, 1996).

La principale différence entre les types de projets tiendra au degré de formalisation des procédures d’évaluation. La question de l’évaluation et de la rémunération en management de projets peut se décliner en quatre problématiques.

a) Pondération de la reconnaissance entre le collectif et l’individuel. Le principe est de faire primer l’équipe-projet sur les performances individuelles mais la difficulté à individualiser la contribution de chacun est forte. Outre cet aspect, se pose, toujours au niveau collectif, la question de l’implication des acteurs de l’aval.

Cette implication représente un coût. Par exemple, dans l’industrie automobile, la participation des techniciens d’usine au plateau du projet
dégrade le ratio de productivité de leur unité de production, ce qui conduit à mesurer la contribution des acteurs-métiers aux projets et à mettre en place des systèmes de facturation intermétiers.

L’autre aspect est la rémunération individuelle. Elle ne concerne, comme contrepartie de ses responsabilités et de son exposition aux risques, que les directeurs ou chefs de projet.

b) Responsables de l’évaluation. L’évaluation des acteurs est complexe dans une structure à géométrie variable qui rend impossible le seul entretien annuel avec le responsable hiérarchique. Plusieurs acteurs peuvent évaluer, ensemble ou séparément.

D’abord, la hiérarchie peut évaluer; selon les cas, il s’agira du commanditaire du projet, du comité de pilotage, de la hiérarchie métiers, de la fonction DRH.

En général, les entreprises préfèrent ménager, en évitant de la froisser, la susceptibilité des hiérarchies, jalouses de leurs prérogatives dans le domaine de l’évaluation. L’évaluation peut également être matricielle. Dans ce cas, les responsables du projet participent à l’évaluation avec les hiérarchies métiers.

Les métiers évaluent alors les compétences techniques déployées sur les projets et la hiérarchie projet évalue la participation au projet et la qualité du travail d’équipe.

c) Critères d’évaluation. L’évaluation des acteurs-projets est nécessairement multicritères.

Classiquement, trois types de critères sont envisageables.

  • Des critères liés aux résultats: la qualité, les coûts et les délais traditionnellement. Cette approche téléologique convient aux projets décomposables ou configurables que l’on rencontrera dans le type B. L’existence d’un client et d’unités d’œuvre repérables permet de mesurer l’écart par rapport à des objectifs fixés initialement.

Les critères de marché comme la satisfaction du client sont quant à eux très délicats à manier. Ainsi dans le cas d’un projet à rentabilité contrôlée est mis sur le marché à son terme, le chef de projet qui tient ses objectifs est reconnu en interne alors même que le projet peut échouer en tant que produit pour des raisons qui sont indépendantes du management du projet (un concurrent first mover occupe déjà le marché, la mode se retourne…). Il s’agit bien dans ce cas de limiter l’évaluation à des critères internes.

  • Des critères liés aux actions et aux comportements des individus (travail en équipe, coopération inter-métiers, capacité à gérer des situations imprévues, prise de risque…);
  • Des critères hors performance (ancienneté, nature du travail, niveau hiérarchique).

Les entreprises cherchent à structurer des critères d’évaluation des équipes-projets qui enrichissent et dépassent les critères classiques : évaluer des compétences transversales ;

  • évaluer l’apprentissage collectif;
  • évaluer des objectifs précis mais aussi des cibles mouvantes qui se redéfinissent en fonction de l’évolution du projet;
  • contrôler le comportement des acteurs-projets autant que leurs résultats;
  • développer l’auto-contrôle à partir de méta-règles;
  • évaluer la capacité à donner l’alerte avant tout dérapage sur le projet; la capacité à proposer des solutions, à contester, à remettre en cause, à arbitrer des conflits…

d) Nature de la reconnaissance. La reconnaissance peut être financière (intéressement, primes…) ou plus symbolique (cadeaux, dîners collectifs, reconnaissance verbale, la gestion des carrières future…), mais les deux sont également importantes.

Hormis les fonctions de chef de projet BTP et de chef de projet informatique, il ne semble pas exister de grille de salaire conventionnelle pour les acteurs-projets. Les systèmes de primes liés à des procédures internes d’évaluation sont instaurés au cas par cas et demeurent relativement occultes.

Le moment de l’évaluation est également important. Réserver l’évaluation seulement à la fin du projet ne permet pas d’influencer la dynamique du projet. Chaque grand rendez-vous du projet peut être une occasion d’évaluation des acteurs.

Réaffectation des acteurs-projets

En management de projets la DRH est directement confrontée à la question de la réaffectation des acteurs-projets: comment l’organisation peut-elle, à la fin du projet, réinsérer ceux qu’elle a (sur)sollicités? comment trouver de nouvelles ressources pour passer d’un projet à l’autre et donc assurer continuité des missions de l’entreprise? La question se pose dans des termes proches pour les différents types de projet:

  • pour des productions unitaires récurrentes, comme dans le type B (ex. les grands projets internationaux de BTP où il s’agit à la fin du projet de démobiliser les équipes puis de remobiliser, parfois dans un temps très court, de nouvelles ressources);
  • pour des développements de produits nouveaux ou projets de type A (ex. l’industrie automobile renouvelle en permanence ses gammes de produits par le lancement récurrent de projets);
  • pour des projets de type C où le problème est surtout de gérer des équipes multi-projets et d’arrêter des développements pour bifurquer et réallouer aussitôt des ressources humaines;
  • pour des projets de type D où il faut gérer la transition entre la phase de montage de la startup et une phase de fonctionnement plus «routinisée». D’ailleurs c’est souvent l’embauche d’un DRH qui marque cette transition, relayant le (ou les) fondateur(s) du projet dans la fonction de recrutement, de GRH et de mise en place d’un système de gestion.

Gérer la fin du projet pour ses acteurs, c’est non seulement les aider à traverser une période qui peut être de déprime, souvent pour ceux qui ont été les plus impliqués, mais il est aussi essentiel pour l’entreprise de capitaliser l’expérience acquise sur un projet.

Pour Nonaka (1994), les projets sont les principaux vecteurs de la création de nouveaux savoirs dans les organisations parce qu’ils mettent en relation des personnes qui restaient auparavant dans leur métier. Il s’agit de diffuser synchroniquement et diachroniquement dans l’organisation les connaissances nouvelles générées par les projets.

La réintégration au sein d’un nouveau projet après la fin d’un projet est une capitalisation interprojets. Elle reste toutefois éprouvante pour les acteurs concernés. Demander aux personnes concernées leurs desiderata plutôt que d’imposer des réaffectations évite bien des frustrations et désillusions.

Dans les grandes entreprises, pour les projets de type A ou B, des systèmes de gestion comme les comités des carrières, inventés à l’origine pour la gestion des salariés expatriés de l’industrie pétrolière, gèrent ces périodes charnières.

Toutefois, il peut être difficile pour les heavy-weight project managers qui ont été autonomes, puissants et enviés, de se réinsérer directement dans des structures permanentes. Les métiers restent d’ailleurs réservés quant à l’accueil des «poids lourds» des projets.

L’effet médiatique externe et interne pendant le projet peut renforcer le risque de transition difficile en fin de projet. Le retour au métier est encore plus risqué dans le cas des projets sortis.

Pourtant, petit à petit, par effet de turn-over, la capacité à participer à un projet devient une composante du métier.

Formation des acteurs-projets

Après avoir situé la notion de formation en gestion de projets par rapport aux situations de formation en management en général, nous insisterons sur les principes pédagogiques de la formation au management de projet. Ils valent évidemment pour les acteurs-projets, mais également pour ceux qui vont le devenir, pour les acteurs-métiers qui vont travailler avec eux, pour les partenaires extérieurs.

Une typologie des situations de formation en entreprise

La notion de formation est en effet très polysémique dans le domaine de la gestion, allant de processus très individualisés et centrés sur des contenus précis (exemple, une formation sur catalogue à l’ordonnancement de projet) à des programmes lourds, déclinant un nouveau
concept de gestion sur l’ensemble d’une entreprise (par exemple les programmes «qualité totale»); des formes plus individuelles s’appuyant sur l’usage de CD-Rom et du e-learning se développent de manière significative mais il est un peu tôt pour en évaluer la performance.

Deux variables apparaissent importantes pour caractériser le contexte: l’état des savoirs sur l’objet et l’enjeu de l’objet pour l’entreprise, ce qu’illustre le tableau 1 (tiré de Boudès, Charue & Midler, 1997) qui permet de définir une typologie en quatre groupes.

Gestion des ressources humaines d’un projet
Tableau 1 : typologie des contextes de formation en entreprise
  • Dans la situation I, on retrouverait les stages inter-entreprises de «sensibilisation», basés sur des présentations synthétiques mais aussi très schématiques d’expériences. Ce sont des opérations ponctuelles, peu interactives. Les participants s’y inscrivent à titre individuel, sur catalogues. Ils en retirent des messages globaux, l’idée qu’il faut poursuivre l’approfondissement de la démarche ou, au contraire, que cela n’en vaut pas la peine. Ce sont généralement des points de départ à des apprentissages plus lourds et plus collectifs.
  • La situation II correspond aussi à des démarches individuelles, mais dans des stages inter-entreprise plus longs et plus instrumentés. Il s’agit ici d’acquérir des techniques opératoires individuelles. C’est une approche qui s’inscrit dans des trajectoires de spécialisation professionnelle.

Dans le domaine du projet, on trouve ici communément deux orientations s’appuyant sur des corpus théoriques aujourd’hui bien connus, l’un plutôt instrumental (les outils de classiques du contrôle de projet en planification, estimation et coûtenance qui font l’objet de certifications), l’autre plutôt comportemental (animation d’équipe, leadership).

  • La situation III correspond à une volonté de changement rapide et massif des pratiques, sur la base d’un transfert et d’une «déclinaison» d’un corpus de méthodes dont la validité a été éprouvée ou du moins légitimée.

L’apprentissage des entreprises passe certes par l’intégration d’objets provenant de l’environnement managérial externe, mais aussi par une interrogation sur l’opportunité de tels transferts, par un travail indispensable d’adaptation et d’intégration dans une activité et une tradition d’entreprise spécifique (Midler, 1986; David, 1998).

Les enjeux et les politiques d’entreprise sont suffisamment évolutifs et multi-critères pour troubler rapidement la cohérence et la pertinence des programmes lourds fondés sur la diffusion de corpus détaillés et stabilisés. Le domaine de la formation au management de projet illustre d’ailleurs lui-même de telles déconvenues (Leroy, 1995).

  • La situation IV correspond à une situation où, d’un côté, l’entreprise a conscience que la compétence en matière de management de ses projets devient un enjeu clé pour sa stratégie mais qu’il n’est pas possible de mobiliser directement un corpus de connaissances précis immédiatement applicable à la nature de l’activité comme aux pratiques professionnelles existantes.

Historiquement, cette situation a précédé la situation III dans quelques grands groupes qui ont mis en place des processus de formation s’appuyant sur des études de cas réels du groupe, co-animées avec des acteurs-projets ayant un rôle dans le projet étudié; il est intéressant de noter que de nombreux cas étudiés correspondent à des échecs, ce qui correspond à une pédagogie particulière. Après stabilisation d’une doctrine, on est alors passé en situation II.

Principes pédagogiques de la formation au management de projet

Les dispositifs de formation en management de projet cherchent à intégrer en six principes les spécificités de la compétence projet (Boudès, Charue-Duboc et Midler, 1997).

  • Formation intégrée.

Le paysage de l’offre de formation au management de projet en France est à la fois particulièrement foisonnant et varié. À côté d’une offre banalisée de conférences ou de stages de tous ordres, sortant les participants du contexte de leur entreprise pendant la durée de la formation, existent des formations intégrées, dispensées à l’intérieur de l’entreprise.

Ces dernières correspondent à une démarche collective et volontariste permettant d’approfondir la spécificité du champ professionnel et des procédures instituées.

  • Confrontation des pratiques internes aux apports des théories et des expériences externes

La participation de chercheurs et de témoins externes permet d’apporter dans le dispositif pédagogique un regard sur des expériences extérieures aux entreprises considérées, qu’il s’agisse de recherches menées dans d’autres entreprises ou de résultats publiés dans la littérature sur le management de projet. Les dispositifs mentionnés reposent ainsi sur la confrontation systématique des pratiques internes et de démarches externes.

L’interrogation sur l’opportunité de transferts, l’adaptation et/ou le «métissage» de concepts généraux dans les contextes particuliers des participants sont au cœur du dispositif.

  • Dispositif de formation-action

L’un des problèmes classiques de la formation professionnelle est la coupure entre la situation du participant au sein du dispositif de formation et sa situation de travail réelle. Dans les démarches traditionnelles, c’est le formateur qui impose son terrain (exposés théoriques, discussions de cas, jeux de rôle). En matière de projet, nous avons vu que cette coupure est particulièrement pénalisante.

La question de l’application d’un principe ou d’une méthode générale à un contexte particulier est en effet aussi essentielle que la compréhension du dit principe ou la maîtrise décontextualisée de la dite méthode.

Pour résoudre ce problème, les dispositifs ont adopté un principe de formation-action, où les projets des participants constituent le support concret sur lequel s’actualiseront la réflexion théorique et l’échange sur le management de projet.

Il s’agit alors d’explorer, sur les situations réelles des stagiaires, ce que peut apporter une méthode ou ce que peut éclairer un concept, quelles sont les conditions et les limites de leur application.

  • Intégration des composantes instrumentales et organisationnelles du management de projet

L’un des effets classiques des formations fondées sur des corpus théoriques est d’exacerber les oppositions de démarches. Typiquement, dans le champ du management de projet, on aura l’opposition entre une vision instrumentale (la technique du planning et du contrôle économique par exemple) et la vision comportementale ou politique (leadership, communication, stratégies d’acteurs…).

Partir de situations de projet réelles oblige au contraire à dépasser ces oppositions en posant la question des rapports et de l’articulation de ces champs dans la pratique. On découvre alors que la valeur instrumentale des outils dépend des relations dans lesquelles ils sont mobilisés.

L’outil planning n’est qu’une surcharge inefficace s’il s’inscrit dans un reporting tatillon. Il peut-être, au contraire, un moyen de cohésion et de solidarité dans l’équipe, s’il est mobilisé dans une démarche de communication, de négociation et de responsabilisation authentique des acteurs.

Symétriquement, on s’aperçoit que le charisme d’un chef de projet n’est rien s’il ne s’appuie pas sur une explicitation des enjeux et des risques associés à sa mission, explicitation qui va passer par des formes d’instrumentation variées.

Une telle ambition très pluridisciplinaire pose immédiatement le problème de la sélection des contenus. Au-delà d’un noyau conceptuel général, c’est le terrain des participants qui est ici le principe de sélection.

Ainsi, d’un stage à l’autre, certains concepts ou champs théoriques sont plus ou moins explicités, parce que la nature du projet en donne ou non l’opportunité. Les projets des participants font ainsi office de révélateurs du corpus général des connaissances en management de projet: chaque projet particulier permet d’échanger sur le management de projet en général (Schön, 1987).

  • Articulation du théorique et du politique

La professionnalisation des responsables de projets n’est pas isolable de l’évolution d’ensemble des processus de fonctionnement de l’entreprise. D’où l’importance de l’institutionnalisation du dispositif dans l’entreprise, de son articulation sur le système politique de management de la firme.

Ce lien prend différentes formes: présence dans les stages de représentants de la direction de l’entreprise lors de tables rondes, existence d’un comité directeur du dispositif permettant de débattre de son fonctionnement et de son évolution.

  • Dispositif inscrit dans la durée, lieu de capitalisation et de débat sur les dynamiques organisationnelles

La création des fonctions de projet institue une marge d’autonomie nouvelle par rapport au management traditionnel. Seule la constitution d’une culture commune peut assurer une cohérence et une mémoire minimum autour de «méta-règles» partagées (Jolivet et Navarre, 1993). Or, la capitalisation inter-projets est difficile et non spontanée. Les projets se présentent tous comme différents.

Les chefs de projet sont mobilisés sur leur mission et ne s’impliquent généralement que peu dans la transmission de leurs pratiques. En outre, une fois les projets terminés, les équipes se dissolvent.

Dans ce contexte, le dispositif de formation est une instance essentielle pour capitaliser et transférer les expériences, faire le lien entre les enseignements des équipes qui terminent et les questions de celles qui démarrent, mesurer les évolutions accomplies, identifier les blocages récurrents.

Cette vision de la «formation-observatoire» implique d’inscrire le dispositif dans la durée et d’en assurer, par le biais des animateurs et/ou de comités de pilotage, la continuité et l’évolution en même temps que s’opère la dynamique de la professionnalisation projet dans l’entreprise.

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